1ère partie : Enregistrer et comptabiliser la population

Les données des recensements en Algérie (1836, 1861, 1866, 1873, 1931, 1936, 1948, 1954) que l’on retrouve dans les fonds territoriaux comme ministériels, associées aux grandes publications statistiques, permettent de comptabiliser les trois populations – européenne, juive, indigène – ayant cohabité sur le sol algérien, ainsi que l’évolution des effectifs.

Les sources d’état civil ou les sources religieuses nous donnent accès aux données concernant les baptêmes, mariages et inhumations et toute la pratique pastorale, ouvrant ainsi la voie aux études sérielles dans une perspective démographique classique. Ces différentes sources présentent également l’intérêt d’autoriser une étude des réseaux familiaux et de sociabilité en œuvre entre les paroissiens, sur la longue durée et sur une bonne partie du territoire. En cela, l’étude des mariages, des témoins dans les différents actes par exemple sont une donnée précieuse.

Par ailleurs, les données des recensements nous renseignent sur l’extrême fragmentation de la société européenne en Algérie. En témoignent les listes nominatives qui donnent toutes les indications d’état civil, mais aussi les origines avec les lieux de naissance, les nationalités, les professions. Si la séparation de base entre Européens et Indigènes est évidente, les catégories pour les Européens sont aussi nombreuses entre Français et étrangers. Et parmi les Français, la différence entre Français d’origine et tous les naturalisés y est pointée.

Ainsi, le cadre juridique des différents « européens » sur le sol algérien permet de s’interroger sur la « fabrique des identités », au regard des droits et situations de fait qui découlent de conditions très diverses. Il semble pertinent d’aborder ces questions sur les premières décennies de la présence européenne, avant les décrets attribuant collectivement la citoyenneté française aux Juifs (1870) et à tous les Européens présents dans les décennies suivantes. Enfin, à partir de la grande loi sur la nationalité de 1889, comment s’expriment les différences entre « néo-Français » et « Français d’origine » ?

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